Le Café Littéraire Plaisançois
 
 
 
Un coeur simple
Gustave Flaubert
 
 
 
 
  Fils d'une famille bourgeoise, Gustave Flaubert s'est beaucoup ennuyé avant de se lancer dans l'écriture. Il est très tôt touché par la mort de son père et de sa soeur, laquelle succombe en donnant naissance à une petite fille. De ses voyages en Italie et en Orient, on peut lire ses Impressions de voyage. En 1851, il s'enferme dans la propriété familiale à Croisset, où il écrira ses grands romans, parmi les plus lus aujourd'hui : Madame Bovary, L' Education sentimentale ou Salammbô. Désabusé et solitaire, Flaubert travaille beaucoup pour chacune de ses oeuvres qui ne rencontrent pas de succès de son vivant. Ses héros, notamment Emma Bovary, représentent bien trop ce que la morale bourgeoise réprouve : liberté et désirs avoués. Gustave Flaubert décède en 1880, foudroyé par une hémorragie cérébrale.  
 
  Ecrit de mars à août 1876, Un cœur simple est vraisemblablement l'un des chefs-d'œuvre de Flaubert.
Le conte marque le triomphe d'une sensibilité à laquelle le romancier donne enfin libre cours. Celui-ci expose le destin de la servante modèle de Mme Aubain, Félicité, animée par un désir d'amour qu'aucun malheur ne parviendra à éteindre. Le film Un cœur simple, réalisé par Marion Laine, est sorti au cinéma le 26 mars 2008, librement adapté du conte de Flaubert. Sandrine Bonnaire est Félicité, Marina Foïs, Mme Aubain.

extrait du livre

Pendant un demi-siècle, les bourgeoises de Pont-l'Evêque envièrent à Mme Aubain sa servante Félicité.
Pour cent francs par an, elle faisait la cuisine et le ménage, cousait, lavait, repassait, savait brider un cheval, engraisser les volailles, battre le beurre, et resta fidèle à sa maîtresse, - qui cependant n'était pas une personne agréable.
Elle avait épousé un beau garçon sans fortune, mort au commencement de 1809, en lui laissant deux enfants très jeunes avec une quantité de dettes. Alors elle vendit ses immeubles, sauf la ferme de Toucques et la ferme de Geffosses, dont les rentes montaient à 5 000 francs tout au plus, et elle quitta sa maison de Saint-Melaine pour en habiter une autre moins dispendieuse, ayant appartenu à ses ancêtres et placée derrière les halles.
Cette maison, revêtue d'ardoises, se trouvait entre un passage et une ruelle aboutissant à la rivière. Elle avait intérieurement des différences de niveau qui fai­saient trébucher. Un vestibule étroit séparait la cuisine de la salle où Mme Aubain se tenait tout le long du jour, assise près de la croisée dans un fauteuil de paille. Contre le lambris, peint en blanc, s'alignaient huit chaises d'acajou. Un vieux piano supportait, sous un baromètre, un tas pyramidal de boîtes et de cartons. Deux bergères de tapisserie flanquaient la cheminée en marbre jaune et de style Louis XV. La pendule, au milieu, représentait un temple de Vesta, - et tout l'appartement sentait un peu le moisi, car le plancher était plus bas que le jardin.

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